1 Sentiers d'hiver au Roc de Chère
Chemins de feuilles mortes,
Chemins gelés,
Chemins humides,
Chemins bourbeux,
Belle nature endormie.
Quelques joggueurs avec leurs chiens,
Quelques chasseurs avec leurs chiens,
Quelques geais piaillant de leur voix éraillée,
Quelques hélicoptères survolant le Roc,
Quelques trous de golf dans le green gelé,
Quelques pensées inquiètes,
Quelques moments de doute,
Quelques souvenirs amers,
Quelques soubresauts d'angoisse,
Quelques visions du Lac,
Quelques bateaux tranquilles,
Quelques lueurs d'espoir,
Quelques raisons d'espérer,
Quelque envie de vivre.
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2 La vie, le vent
Qui peut savoir d'où vient le vent,
Par delà le soleil levant,
Sur les sommets et sur les plaines,
Sur les chemins à perdre haleine ?
Qui peut savoir d'où vient la vie ?
Etre de chair, âme asservie.
Souffrir, aimer, chanter, gémir,
Etre jusqu'au dernier soupir.
Mourir d'amour, de désespoir,
Partir ailleurs, comment savoir ?
Au corps humain l'âme est ravie,
Qui peut savoir où va la vie ?
Le vent s'en va, nul ne l'arrête,
Perdez la tête girouettes.
Par delà le soleil couchant,
Qui peut savoir où va le vent ?
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3 Liberté
J'ai largement participé
Par le passé
Au participe passé.
Un jour, sur les nombres premiers,
J'ai même été premier.
Mais j'ai fait tant de contorsions
Pour lire Ovide et Xénophon,
Tant d'efforts que le temps emporte
Au cimetière des langues mortes
Que j'ai conçu de l'aversion
Pour la Version.
Qu'elle soit Grecque ou bien Latine,
Ou Orthodoxe ou Byzantine,
Et, pourquoi pas, Chryséléphantine,
La leçon ! S'il vous plait, Arrêtez !!!
Et la messe, me direz-vous,
Qu'en est-il ?
Moi, Monsieur,
J'en ai trois mille à mon actif !
Qui dit mieux ?
Pendant sept ans de ma jeunesse,
Tous les matins j'ai eu la messe.
Permettez que je me repose
Après pareille overdose!
Dieu ne m'en fera pas grief,
Il m'a déjà tout pardonné.
Il le sait bien, par Saint Joseph !
Que là aussi
J'ai déjà donné.
Je dois vous parler des affaires.
Vingt ans de vie, de "trop à faire".
Gagner du fric, la belle affaire,
C'était mon unique Credo.
Ça aussi, j'en ai plein le dos!
Et la gloire, me direz-vous,
Qu'en advient-il ?
Moi, Monsieur,
Je m'asseois dessus.
Car pour l'avoir par trop reçue,
J'ai trop reçu.
La gloire ? Qu'elle s'en aille en haillons,
Qu'elle s'envole en poussière,
Ou qu'elle se répande en flaques,
Car d'elle aussi j'en ai ma claque.
Moi, j'ai besoin de liberté !!!
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4 L'homme d'affaires
Il faut dire que l'homme d'affaires
N'est pas quelqu'un de très marrant.
Complet veston,
Attaché case,
Et sourire à la boutonnière.
Mais attention,
Sourire béton !
Dents carnassières !
Grande ambition
En bandoulière !
L'homme d'affaires,
C'est comme ça presque tout le temps.
Il est vrai que l'homme d'affaires
Est quelqu'un qui n'a pas de temps.
Aéroports,
Hélicoptères,
Voyages aux quatre coins de la terre,
Sans rien voir, c'est bien évident.
Pourtant, le temps, c'est épatant.
C'est un ruban de soie vive
Qui relie l'instant à l'instant
Comme bouquets de sortilèges
Noués au destin qui dérive.
Oui, mais pour lui, quel sacrilège
Que de laisser couler le temps !
Pour lui, le temps, c'est de l'argent !
Enfin…
C'est comme ça très très souvent.
Il faut dire que l'homme d'affaires
A toujours grand besoin d'argent
Justement.
Car pour lui il est de bon ton
D'être brillant parmi ses pairs
Comme au ciel, l'étoile polaire
Est reine des constellations.
Voiture de luxe,
Sports d'hiver,
Et résidences secondaires.
Bel équipage, assurément,
Roulant sur un train d'enfer !
Voyez-vous, pour l'homme d'affaire,
L'argent, c'est son carburant.
Enfin…
La plupart du temps.
Il est vrai que l'homme d'affaires
Est peu sensible à l'air du temps.
La poésie,
Le beau,
Les roses,
Lui sont assez indifférents;
Mais pas les clichés du moment:
Les modes et les vues conformistes
Lui sont un rempart excellent
Contre le désordre des choses.
Non, ce n'est pas un fantaisiste,
Ni un rêveur, ni un artiste.
Un artiste ? L'homme d'affaires ?
Pour lui, l'art, c'est un placement,
Tout simplement.
Eh oui,
C'est rarement autrement.
Il est vrai que l'homme d'affaires
N'est pas quelqu'un qui vit gaiment.
L'agitation,
L'anxiété,
Le stress,
Et mille autres tiraillements
A la sérénité contraires,
Gâchent jusqu'à ses bons moments.
Est-ce le rire ou la colère
Qu'on voit quand il montre ses dents ?
Est-ce un mélange détonant
Dont lui-même ne sait que faire ?
Ne lui jetons pas trop la pierre.
N'oublions pas: l'homme d'affaires,
Même s'il rit à belles dents,
Il rit dehors, mais pas dedans.
Et ça, c'est jamais marrant.
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5 Harangue au Lac
Dis moi, Lac,
Toi, tu t'en fous !
Tu roules tes vagues nonchalantes,
Et moi, je flotte,
Et moi, je tangue,
Dans ma barque de solitude.
A nous deux que je te harangue:
Tu sais des choses millénaires
Du fond de tes fosses profondes.
Allons ! Il faut que tu répondes.
Pourquoi la glace du matin
N'arrête pas le pèlerin ?
Pourquoi la garce de l'été
Te montre son cul tout bronzé ?
Pourquoi le cygne en majesté
Déroule son cou majuscule ?
Jusqu'où la mouette en liberté
Déploie son vol calligraphique ?
Pourquoi les pires hécatombes
Sont annoncées par des colombes ?
Pourquoi tu dégrafes en fanfare
Les fanfreluches de l'espoir ?
Pourquoi ma gueule enfarinée
Fait gueuler le fou d'à côté ?
Pourquoi sa bouille d'enfoiré
Affiche, un air si magnifique ?
Pourquoi parfois tout est sympa ?
Pourquoi souvent c'est la panique ?
Jeune homme,
Je suis le Lac,
Et te déclare
Qu'il est possible de savoir:
Pour ça, tu dois devenir onde.
Il faut alors que tu te fondes,
Avec ta barque
Dans mes profondeurs.
Si non je garde mon mystère
Et te renvoie à tes galères.
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6 Contre-chant d'Automne
Je ne vous referai pas
Le coup des feuilles mortes,
Ni celui de la forêt
Avec son manteau d'or.
Je vous ferai grâce aussi des colchiques
Dont les prés pourtant se parent.
Ne comptez pas sur moi
Pour vous parler des brumes
Et des pavés mouillés;
Pas plus que des autans,
Ou des marées d'équinoxe.
Je ne veux pas non plus
Des pensées nostalgiques,
Des "sanglots longs des violons",
De "nos étés trop courts",
De l'orage qui tonne.
Pourtant, Dieu que c'est beau
Tout ce qui fait l'automne !
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7 Le coin du voile
Ami,
Je crois qu'il est encore trop tôt
Pour que se lève
Le coin du voile.
Je sais,
Tu as cherché longtemps
Le long des fondrières,
Par les sentiers sauvages
Pourvoyeurs d'horizons
Qui s'éloignent du même pas
Que le tien.
Tu as marché longtemps
Entre le chêne de la vertu
Et la fleur du désir,
Si belle aventureuse
Mais parfois vénéneuse,
O combien!
Tu as noué tant de vertiges
Au vent du large
Au creux de la vague
Et à la vergue du voilier !
Vois, sur le sable de la grève
Tous les pas que tu as gravés.
Ami,
Ton élan
Sur la pente du temps
S'est usé.
Allons,
Reprends courage.
Je sais,
Tu le vois loin,
Le moment où il se lèvera,
Le coin du voile.
Avance !
Peut être est-il plus près
Que tu ne penses !
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8 Teintes et demi-teintes
Un peu de bleu au fond des yeux,
Un peu de grège au fond du cœur.
Un peu de rouge au fond du ventre,
Un peu de jaune au creux des mains,
Un peu d'ocre au creux de mes reins.
Un peu de bistre au fond de l'âme
Et beaucoup de vert dans ma tête.
Un peu de brume au fond des yeux,
Restes d'orage au fond du cœur.
Un peu de rage au fond du ventre,
Un peu de feu au creux des mains,
Un peu de foudre au creux des reins.
Un peu de vague au fond de l'âme
Et beaucoup de folie dans ma tête.
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9 Culturellement
Connaissez-vous Platon ?
Avez-vous lu Homère,
Pindare et Xénophon ?
Thalassa ! Thalassa !
Et Thucydide, et Sophocle,
Euripide, Empédocle ?
Les comédies d'Aristophane ?
Lysistrata, Lysistrata,
La grève des femmes !
Savez-vous qui sont
Alcybiade,
Et Aristogiton ?
Et celui qui écrivit les Philippiques ?
Comment, déjà ?
Celui qui gueulait sur les plages
Avec des cailloux plein la bouche...
Démosthène !
Oui, C'est bien ça...
Et Cicéron ?
Il avait une verrue
En forme de pois chiche
Sur le nez.
Néron qui bandait
En regardant brûler Rome ?
Caligula ?
Qui avait nommé son cheval, consul;
Fou celui-là.
Archimède ?
Tout corps plongé dans un liquide
Na na ni, na na na,
Euréka ! Euréka !
Que savez-vous de Proust
Et de son temps perdu ?
Et Zola qu'on vous assène
Comme un assommoir ?
Excusez l'assonance.
Et de Corneille ?
Connais pas de personnage
Plus idiot que le Cid.
Et de Rousseau ?
Mais je n'ai pas parlé
De Charlemagne,
Ni d'Hadrien,
Ni de Sénèque,
Ni de Trajan,
Ni de Louis XIV,
Ni de la Reine Victoria,
Ni d'Edouard Herriot,
Ni même de Jaurès.
Pourquoi ai-je oublié
Pythagore,
Lavoisier,
Catilina et Gallilée ?
Et Jefferson,
Et Bismarck,
Et Pétain ?
Pétain de Pétain !
Oublié aussi
Claude François
Et François de Closet,
Et l'origine du mot Water Closed.
Pourquoi omettre
John Wayne,
Jean Gabin,
Gérard Philippe,
Marlon Brando,
Et Brigitte Bardot ?
Pourquoi mourir idiot ?
Et Jack Lang... Jack Lang...
Oui, pris séparément, ils me sont quelque chose
Et très souvent beaucoup,
Mais, "culturellement", tous ils m'emmerdent fort
Et je le dis bien haut !
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10 Histoire
Tout homme a une Histoire;
Son Histoire,
Faite de milliers de petites histoires:
Histoires de rue,
Histoires de roue,
Histoires de rouille;
Histoires de fou,
Histoires de flou,
Histoires de fouille;
Histoires de cou,
Histoires de clou,
Histoires de... nouilles;
Moi-même, je n'échappe pas à la règle;
J'ai mon Histoire,
Faite d'innombrables petites histoires:
Histoires de paix,
Histoires de prêt,
Histoires de presse;
Histoires de taie,
Histoires de trait,
Histoires de tresse;
Histoires de fait,
Histoires de frais,
Histoires de... messe;
Et vous qui m'écoutez,
Vous n'échappez pas davantage à la règle;
Vous avez vous aussi votre Histoire,
Faite de très nombreuses petites histoires:
Histoires de tri,
Histoires de truie,
Histoires de ton;
Histoires de fric,²
Histoires de fruit,
Histoires de fond;
Histoires de cri,
Histoires de cuit,
Histoires de... pont,
Alors,
Puisque tout cela c'est notre Histoire;
Puisque "c'est déjà" une Histoire;
Pourquoi en "faire" une histoire ?
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11 Salon sur cour
Côté frimeur,
C'est plutôt court.
Côté faiseur,
Plutôt banal.
On voit pas grand-chose
Côté cour.
C'est pas grandiose
Côté canal.
L'peintre a son pinceau,
Le sculpteur, son marteau,
L'musicien, son piano,
Et l'coureur, son vélo
Ou son auto;
Lui, c'est tout dans son ciseau,
Figaro.
Du côté tif
C'est pas dégueu.
Côté tarif
C'est juste au poil.
Super coup'de douille,
Quand tu veux.
Y'a pas d'embrouille
Du côté poils.
L'peintre a son pinceau,
Le sculpteur, son marteau,
L'musicien, son piano,
Et l'coureur, son vélo
Ou son auto;
Lui, c'est tout dans son ciseau,
Figaro.
Du côté cœur,
Ecout'moi bien:
Un enchanteur,
Un troubadour.
Un super conseil,
Voilà, tiens:
C'est pas pareil
"Salon sur cour".
L'peintre a son pinceau,
Le sculpteur, son marteau,
L'musicien, son piano,
Et l'coureur, son vélo
Ou son auto;
Lui, c'est tout dans son ciseau,
Figaro.
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12 Rester enfant
Si t'as la chance d'êt'resté enfant,
Faut pas faire semblant d'être un homme,
Ca sert à rien.
Si t'as la chance d'êt'resté enfant,
Faut pas t'bousiller, bonhomme,
Comme ça t'es bien.
Grand comme un problème,
Suffisant comme un théorème,
Compliqué comme un stratagème,
Dans son salon du seizième;
Dev'nir bourgeois ?
Non non, toi tu peux pas.
Si t'as la chance d'êt'resté enfant,
Faut pas faire semblant d'être un homme,
Ca sert à rien.
Si t'as la chance d'êt'resté enfant,
Faut pas t'bousiller, bonhomme,
Comme ça t'es bien.
C'est moi l'bon apôtre,
Tant pis si dans l'argent je m'vautre,
Tant pis si c'est pas l'mien, mais l'votre;
Aimez-moi les uns les autres.
Politicard ?
Non non, toi tu peux pas.
Si t'as la chance d'êt'resté enfant,
Faut pas faire semblant d'être un homme,
Ca sert à rien.
Si t'as la chance d'êt'resté enfant,
Faut pas t'bousiller, bonhomme,
Comme ça t'es bien.
Théories fumeuses,
Et prétention faramineuse;
Un'gueule infâme et pas fameuse,
Circonlocutions foireuses,
Toi, intello ?
Non non, toi tu peux pas.
Si t'as la chance d'êt'resté enfant,
Faut pas faire semblant d'être un homme,
Ca sert à rien.
Si t'as la chance d'êt'resté enfant,
Faut pas t'bousiller, bonhomme,
Comme ça t'es bien.
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13 Mon Cimetière
Voyez-vous, j'ai mon cimetière,
Avec ses tombes,
Et ses croix,
De bois,
De pierre.
Voici ma tombe de tous les jours;
Elle est simple, vaste et profonde.
J'y enterre au jour le jour
Cent guenilles nauséabondes:
L'orgueil, le mentir, le médire,
Les mots de vipère,
Et la colère en corollaire;
Oui, cent guenilles de misère.
Ici ma tombe buissonnière,
Sous le couvert du petit bois.
Ci-gît l'ombre de mes chimères
Qui encor me montrent du doigt :
Les hauts faits, les actes héroïques
Que j'ai failli accomplir,
Ma vaine marche stoïque
Dans le désert du devenir.
Et tout ce qui, quoi que j'en dise,
Ressemble à de la couardise.
Ma tombe des grands jours rivalise
Avec les plus beaux mausolées.
Elle est grande comme une église
Et pourtant, pleine à craquer
De victimes d'hécatombes:
Morts au bûcher,
Par pendaison;
Justes châtiments qui m'incombent
Pour crime et haute trahison.
Quelquefois, quand la nuit tombe,
Les soirs d'été,
Et que je flâne entre les tombes,
Je vois danser des feux follets.
Ils voltigent sur les dalles grises,
Dans les allées, entre les croix.
Ils se posent même sur moi.
Alors, à l'oreille ils me disent:
"Nous dormons sous les dalles grises;
Morts vraiment,
Nous ne le sommes pas.
Nous t'attendons dans l'au-delà".
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14 Plus Rien
Bâtir un empire;
Tu rames, tu transpires;
La galère en pire;
Moi, ça m'fait pas rire.
Rien,
Rien,
Plus rien,
Je suis plus rien,
Je suis personne.
Tous ceux qui m'veulent'du bien,
Je les retiens;
Tous ceux qui m'aiment'pas bien,
Je les Cambronne.
Rien,
Rien,
Plus rien,
Je suis plus rien,
Je suis très bien.
J'étais un magnat;
Oseille et loufiats,
Macao, Bahia;
C'est bien loin tout ça.
Bien,
Bien,
Très bien,
Je suis très bien,
Je suis personne.
Tous ceux qui m'sont pas rien,
Je les retiens;
Tous ceux qui m'disent rien,
Je m'en tamponne.
Bien,
Bien,
Très bien,
Je suis très bien,
Je suis plus rien.
J'ai tout balancé:
Bureau, PDG;
J'vais pas r'commencer,
J'en ai bien assez.
Rien,
Rien,
Plus rien,
Je suis plus rien,
Je suis personne.
Tous ceux qui m'veulent'du bien,
Je les retiens;
Tous ceux qui m'aiment'pas bien,
Je les Cambronne.
Rien,
Rien,
Plus rien,
Je suis plus rien,
Je suis très bien.
J'suis un potentat
Du temps qui s'en va,
De c'qu'est beau là-bas
Mais qui s'en va pas.
Bien,
Bien,
Très bien,
Je suis très bien,
Je suis personne.
Tous ceux qui m'sont pas rien,
Je les retiens;
Tous ceux qui m'disent rien,
Je m'en tamponne.
Bien,
Bien,
Très bien,
Je suis très bien,
Je suis plus rien.
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15 MacIntosh
Là, les copains, faut m'écouter
Pass'que ça peut vous arriver su'l'coin du nez,
Parachuté.
J'ai un ami bien sympathique,
Son pays c'est l'Informatique.
Certains l'appellent "the Computeur",
Moi, c'est plutôt Ordinateur.
Y tourne plus rond qu'un Derviche,
Il est malin comme un Scottish.
C'est un grand faiseur de cinoche.
Et son vrai nom c'est Mac Intoche.
Y'a des choses'qu'y faut pas toucher !
Et surtout pas ma liberté.
Lâch'moi les baskettes, Mac !
Lèch'pas, lèch'pas mes chaussettes, Mec !
Lâch'moi les baskettes, Mac !
Lèch'pas, lèch'pas mes chaussettes, Mec !
Quand y s'est installé chez moi,
S'est fait tout p'tit pendant des mois.
Mais un jour il a commencé:
Y m'a d'abord fait mon courrier.
Puis, y s'est occupé d'mes comptes,
Tout'mes pap'rasses, tous mes décomptes.
Maint'nant c'est mêm'lui qui décroche
Ce sacré foutu Mac Intoche.
C'est lui qui m'réveill'le matin,
Y chauf'le four, y fait l'gratin.
Y s'est mêm'branché sur ma banque.
Et moi, j'suis plus qu'un saltimbanque...
Il est terribl'y sait tout faire,
Paraît qu'c'est lui qui fait la guerre.
Dis moi, sacré vieux Mac Intoche:
Et l'amour ? C'est aussi fastoche ?
Eh, les copains, qui m'écoutez,
Moi, tout ça, ça m'est arrivé su'l'coin du nez,
Parachuté.
Y'a des choses'qu'y faut pas toucher !
Et surtout pas ma liberté.
Lâch'moi les baskettes, Mac !
Lèch'pas, lèch'pas mes chaussettes, Mec !
Lâch'moi les baskettes, Mac !
Lèch'pas, lèch'pas mes chaussettes, Mec !
Modem-Tableur-Streamer-Mega-Octet-Serveur-Index-Curseur-Souris…
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16 Bel Canto
Il parait que la Castafiore
avait complètement déraillé ce soir-là
à la Scala
Evidemment
me direz-vous
elle chantait Faust !
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17 Pillons
En temps de paix
en temps de guerre
mon Dieu
comme les mots diffèrent !
En temps de paix on entend dire:
"Allons aux papillons..."
En temps de guerre:
"Allons au pas !...
Pillons !!!"
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18 Vers Santiago
Autant de cailloux sur le chemin de Compostelle
que d’étoiles dans le ciel
Autant d’étoiles dans le ciel
que de cailloux sur le chemin de Compostelle
Et je sens bien que chaque caillou du chemin
est un éclat de vérité qui me concerne
Et je sens bien que chaque étoile dans le ciel
brille d’un éclat qui me concerne
Et j’avance à pas lents sur ce chemin de vérité
jour après jour, étape après étape
Seule mon ombre m’accompagne
devant moi le matin, et derrière le soir
J’entends mes pas sur les cailloux
battant comme l’horloge
et le fer du bourdon
Et ma folie est telle
que même au pas de l’escargot
j’arriverai un jour à Compostelle
mon sac et ma coquille sur le dos !
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19 Ceux d'avant
Né en quarante, au mois de Juin,
Au beau milieu de la tourmente,
Fils de Francis et fils de Jeanne,
J'avais déjà vécu un millénaire.
Que dis-je, un millénaire ?
Peut-être dix, peut-être cent !
En quatorze,
Et dans la Marne, et sur la Somme,
J'étais déjà là par mon père,
Ferraillant avec les allemands.
Plus avant,
Je descendais tout droit
De Robespierre,
Une aïeule l'avait eu pour amant.
J'étais aussi cousin de la Reine,
Deux fois même: par Marie, l'Autrichienne,
Dixième grand-mère du côté de ma mère,
Et Antoinette, sa cousine,
Qui fut la mère d'un grand-père de mon père,
Beau cousin du roi de Bavière.
Et celui-ci n'était autre
Qu'un descendant direct
D'un prince Sarrazin.
Ainsi j'ai bien connu le royaume d'Espagne.
Les châteaux de Castille, les palais de Grenade,
Et les nobles seigneurs,
De Boabdil à Charles Quint.
Je dois à cet aïeul,
C'est plus que certain,
Mes cheveux noirs frisés,
La force de mon bras,
L'adresse de ma main,
Et tous ces traits d'intelligence
Qui brillent encore en mon esprit,
Comme ils brillaient alors
De Séville à Byzance.
A Compiègne j'étais sous les tours,
Tout cliquetant d'armure, heaume et gants,
Avec Jeanne, "la bonne lorraine
Qu'Anglais brûlèrent à Rouen".
Elle était du rameau d'une branche,
Du même tronc qu'un lointain parent.
J'avais, il m'en souvient,
Un fameux coup de sabre,
A pourfendre l'Anglais,
Le laissant tout fumant.
Pour un peu, j'aurais vu brûler Rome;
Néron était mort peu avant.
Demi-frère d'Hadrien,
Mon ancêtre fut fait par lui
Principal bibliothécaire
Dans sa villa de Tivoli.
Voilà donc comment j'ai connu
Les sénateurs et les tribuns
De l'empire, encore tout puissant.
Quelques mille ans plus tôt,
Sous les doux oliviers,
Et les lauriers du Péloponnèse,
J'ai rencontré le vieil Homère
Et tous ses valeureux héros.
Ulysse était d'ailleurs
Un aïeul trois fois millénaire
Dans la lignée qui engendra ma mère.
Entre temps,
J'avais reconnu Jésus et ses apôtres,
Et bien avant, Moïse, Abraham et les autres...
Les douze plaies d'Israël,
Le joug de Pharaon,
"Les blancs ruisseaux de Canaan".
Mais, ma mémoire est incertaine;
Cela est beaucoup trop ancien.
Avant encore, et bien avant,
Il y avait d'autres ancêtres;
Je revois l'un d'entre eux,
Vaguement... Vaguement...
Attendez... Le souvenir remonte...
Je crois qu'il s'appelait... Adam !
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